Voici un livre qui m'a beaucoup éclairé, qui m'a aussi aidé à travailler et à comprendre ce thème là.
L'approche de ce livre est sociologique mais il donne un champ de compréhension très élargi et complet à mon sens.
Voila pour ce petit partage.
Albert Memmi distingue les concepts de sujetion et de dépendance, de dominé
et dépendant, en ce sens que le dépendant tire un profit de sa dépendance, le
dominé ne gagne rien à être dominé, même si les situations peuvent coïncider
elles ne sont pas systématiques.
Il définit la domination comme un « ensemble de contraintes imposées par le
dominant sur le dominé », et définit donc la sujetion comme « l'ensemble des
réponses actives ou passives du dominé aux agressions du dominant ».
Quant au dépendant, il sera angoissé par le manque de sa pourvoyance.
La dépendance serait à l'œuvre dès la naissance, où le bébé est dépendant de
sa mère pour la satisfaction de ses besoins. La dépendance se rapprocherait
ici de l'attachement, bien que l'attachement ne s'applique pas pour ce que
Memmi appelle les phénomènes collectifs.
Ainsi, l'homme tout au long de sa vie ne se départirait pas selon Memmi de ce
besoin de dépendance, et trouverait alors dans d'autres supports ce rapport de
dépendant-pourvoyeur que ce soit au travers de la religion, des relations
amoureuses, des dépendances aux produits, au jeu, au travail, affectives etc..
La dépendance est alors dans ce cadre « une relation contraignante, plus ou
moins acceptée, avec un être, un objet, un groupe ou une institution, réels ou
idéels, et qui relève de la satisfaction d'un besoin ».
Ce besoin sur toile de fond se traduirait alors par un recours à des supports interchangeables.
Memmi inscrit les mécanismes de dépendance en interaction entre le
dépendant , le pourvoyeur et l'objet de pourvoyance.
L'objet de pourvoyance étant « tout ce qui permet de répondre à une
dépendance: un être, un objet proprement dit, une représentation ou une
activité ». Le pourvoyeur se situe aussi dans une dépendance puisque le
dévouement qu'il met a l'oeuvre pour assurer à l'autre ce dont il a besoin lui procure estime de soi et paix.
Concernant la dépendance à un objet, Albert Memmi évoque l'aspect rituel de
ces conduites. Au delà de la dépendance physique de l'usage de certains
produits, il existe une dépendance aux rituels. Il présente l'acte de fumer, par
exemple, comme un rituel individuel et social qui a pour but de lutter contre la
solitude, la dépendance au travail comme moyen de s'occuper.
Ce rituel est alors la parade à l'anxiété, à l'angoisse à la solitude.
Le pourvoyeur est souvent idéalisé et ne peux pas répondre à toutes les
exigences du dépendant, pour que la relation se poursuive il est nécessaire
qu'elle soit synonyme de sécurité et de stabilité.
L'angoisse est très vite de retour si une menace plane au dessus d'une
dépendance, si la pourvoyance est menacée de cesser.
A la question de savoir si une dépendance peut être heureuse, Memmi répond
que non puisqu'il n'existe pas de dépendance dont la satisfaction est assurée
totalement.
De l'angoisse du manque et de la rupture, émerge donc la souffrance, puisque
la dépendance et la pourvoyance est une recherche de plaisir et de sécurité
absolue.
Pour certains dépendant le fait de supprimer la cause des souffrances est un
moyen de ne pas souffrir à postériori car ils croient impossible de vivre sans
leur dépendance. « pour faire cesser le doute affreux, qui ronge la relation de
dépendance-pourvoyance, on détruit la relation elle-même. Et s'il est
impossible de la détruire, on se détruit soi-même; le but est le même: mettre fin
à la torture. »
Les stratégies de réduction de la souffrance sont alors utilisées, ce sont des
rites de passages ou de rupture, des codes sociaux, qui par leur préparation au
changement vont conduire à un amenuisement de l'anxiété. Ces rites selon
Memmi font aussi parties de certaines dépendances, puisque par leurs aspect
individuels et sociaux aident à la lutte contre la solitude.
La dépendance a donc pour fonctions: la « garantie contre l'esseulement, un
recours contre la destruction et un exorcisme contre la mort ».
Elle est « l'une des bases du lien social », car elle demande de la réciprocité. Memmi part du
postulat que la liberté totale n'existe pas, et que les formes de quête
d'indépendance extrême traduiraient un peur de la relation à l'autre.
Ainsi, accepter la dépendance c'est être confiant en soi et en autrui.
Le dépendant préfère payer le prix de la nocivité de certaines dépendances
plutôt que de souffrir, ce qui rend les interdits inefficaces dans l'aide apportée
aux dépendants.
L'aménagement de la dépendance est donc plus avantageuse, qu'elle soit une substitution de l'objet de pourvoyance, ou par
L'aménagement de la dépendance est donc plus avantageuse, qu'elle soit une substitution de l'objet de pourvoyance, ou par
exemple une maîtrise de son désir. Ainsi, pour Albert Memmi, la lutte contre les
dépendances, si lutte il doit y avoir - les conséquences d'une rupture pouvant
être pire que la dépendance elle-même - doit se faire grâce à une permissivité
dans un contexte précis. Le rituel a donc cette fonction: assurer des
transgressions permettant de rester dans les limites du supportable.
La substitution idéale n'existe pas car aucune pourvoyance ne règle toutes les
anxiétés à la fois. L'Homme est donc selon Memmi, « un être-avec », un être en-
relation »
Les phénomènes de dépendance trahiraient donc un lien social qui a du mal à
s'établir .
Les phénomènes de dépendance relationnelle prendraient-ils corps sous forme
de conduites à risque et addictions à l'adolescence?
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